Il est né et a grandi dans les quartiers nord de São Paulo, au milieu des enchevêtrements chaotiques de baraquements de fortune, parmi la misère et la violence. Mais sa ville, hydre tentaculaire et infernal, lui a également insufflé une force combative qui fait à présent toute l'intensité de son hip-hop. 

Emicida (Leandro Roque de Oliveira pour l'état civil) a gagné ses galons de MC au cours de battles d'impro, ainsi que son surnom – Emicida est la contraction de "MC" et de "homicidio", en référence à ses rimes assassines. Il est ainsi devenu très vite la révélation underground de son pays où ses mixtapes font fureur, et son nom est régulièrement associé à ceux de Projota et de Criolo, le glorieux aîné. 

Et si son hip-hop garde quelque chose de sa hargne première, Emicida a su l'orienter dans une voie positive et subversive à la fois, pour en faire le reflet remarquable d'une génération fière de ses racines (ethniques et culturelles), indépendante et militante, bien décidée à aller au bout de ses envies.  

LUCAS SANTTANA (BRÉSIL) 

Avec son pénultième album, le Brésilien avait bénéficié d'une reconnaissance internationale et avait conquis un large auditoire. En 2014, c'est le label français No Format ! qui sort Sobre noites e dias, sorte de condensé des pistes musicales précédemment explorées : dub, baile funk, pop, electro... Manifestement, Lucas Santtana s'amuse beaucoup avec ces influences, qu'il orchestre avec une maîtrise qui jamais ne bride sa créativité effrénée. Sa bossa électronique, d'une vigueur très roots et très contemporaine à la fois, organique et synthétique, s'inscrit naturellement dans une tradition artistique qu'elle assimile et transcende tout aussi naturellement. Chaleureuse et teintée de spleen (selon que sont utilisés le portugais ou l'anglais), sobre et parfois franchement dadaïste, son écriture poétique fait de Sobre noites e dias une œuvre d'emblée conviviale et singulière, éminemment sympathique – c'est la force de certaines musiques que de nous envelopper, comme un cadeau inattendu, de leur généreuse bienveillance.

CHARLES X (USA) 

Le label Tentacule Records a semble-t-il déniché le nouveau prodige du R'n'B, au patronyme pour le moins extravagant (d'autant que le dernier roi Bourbon n'a pas laissé un souvenir glorieux dans les annales nationales – mais ceci est une autre histoire). Le nouveau Charles X donc, est originaire de Los Angeles et, en dépit de sa jeunesse, fait preuve d'une maîtrise et d'une maturité musicales proprement étonnantes, comme en témoigne son premier album, The Revolution... and the day after. Maniant les codes et les rythmes de la soul, du hip-hop et du R'n'B, il passe, ou plutôt glisse de l'un à l'autre avec une parfaite aisance ; tour à tour volubile, soyeux et dolent, son flow s'immisce avec malice dans tous les registres. Il est sans conteste le nouveau dépositaire de l'éternel esprit soul et de son message d'amour, à l'instar d'Al Green qu'il vénère, mais s'inscrit également dans une démarche résolument contemporaine, comme l'attestent ses récentes collaborations avec le beatmaker bordelais Redrum. Preuve qu'il a les idées bien plus larges que son royal homonyme.