Vous avez dit 49-3 ?
Non rassurez-vous, 49-3 n'est pas une opération d'arithmétique de calcul mental et encore moins un langage codé. En fait, c'est un recours que peut brandir le gouvernement à tous moment si l'Assemblée Nationale fait barrage. Explications.
Depuis le mardi 17 février, tout le monde n'a que ces chiffres à la bouche : 49-3. Mais que signifie-t-il vraiment ? Pourquoi dit-on que le gouvernement a fait preuve d'un "déni de démocratie" ?
Ce que dit la loi
L'article 49 permet au Premier ministre, après délibération du Conseil des ministres (un conseil extraordinaire a été tenu mardi 17 février juste avant le vote de la loi Macron), d'engager la responsabilité du Gouvernement pour passer outre le vote d'un projet de loi, c'est à dire adopter la loi sans la voter.
Ce principe, un brin oligarchique, est contraire au fondement propre à la démocratie. Néanmoins, il peut s'avérer utile dans la mesure où l'Assemblée ralentit grandement la prise de décision et peut parfois bloquer le pouvoir en place (en cas de minorité parlementaire comme aujourd'hui).
Bien entendu, l'article 49 alinéa 3 n'est pas imperméable et peut être mis à mal par le vote d'une motion de censure. Pour faire voter une motion de censure il faut qu'elle soit proposée moins de 24h après l'engagement de la responsabilité du Gouvernement et qu'au moins un dixième des membres de l'Assemblée Nationale l'ait signée.
Le vote ne peut avoir lieu que 48h après le dépôt de la motion. À l'heure actuelle, il est prévu pour le jeudi 19 février à 18h.
Deux solutions sont alors possibles : en cas de majorité favorable à la motion de censure, le gouvernement se voit dans l'obligation de démissionner et peut entraîner la dissolution de l'Assemblée Nationale. Si aucune majorité favorable à la motion de censure ne se dégage, alors le projet de loi est adopté. (ici la loi Macron)
Mais dans le cas où le gouvernement démissionne, il est possible que le Chef d'État suive la tendance, entraînant une élection présidentielle anticipée.
Y a-t-il un risque pour que le gouvernement démissionne ?
Le gouvernement dos au mur
De peur de ne pas obtenir une majorité lors du vote de la loi Macron à l'Assemblée Nationale, Manuel Valls a engagé la responsabilité du gouvernement, avortant le vote avant qu'il ait lieu. Bien sûr, il aurait pu essayer de faire passer la loi de manière classique, mais il ne voulait pas "perdre du temps avec ceux qui ont d'autres objectifs que les problèmes des français (?)". Sous-entendu les frondeurs socialistes qui s'opposaient au projet de loi Macron et qui, sans leur défiance à l'égard de la politique du gouvernement, auraient constitués la majorité manquante.
De plus, Manuel Valls croit en la majorité pour le vote de la motion de censure et se sait à l'abri d'une demande de démission du gouvernement : "la majorité sera au rendez-vous jeudi soir [...] le gouvernement va continuer à travailler, à réformer plus vite et plus fort."
Il faut savoir que dans la matinée du mardi 17 février (jour du vote du projet de loi Macron), un communiqué de presse de Bercy faisait savoir que la loi avait été adoptée avant même que le vote ait eu lieu... Signe que le gouvernement prévoyait, de longue date et ce, même avant le conseil extraordinaire des ministres, que l'article 49 alinéa 3 allait être utilisé.
Reste à savoir maintenant si la motion de censure sera votée, mais il y a fort à parier que le gouvernement reste en place tel qu'il est et que la loi soit définitivement adoptée.
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Article réalisé par Louis Scocard
Publication : Mercredi 18 FéVrier 2015
Illustration : L'hémicycle de l'Assemblée Nationale