Un Beau Dimanche, le drame discret de la bourgeoisie
Le dernier film de Nicole Garcia conte avec pudeur et sensibilité une rencontre amoureuse improbable sur fond de lutte des classes. D’une simplicité attachante.
Baptiste est instituteur volant dans le sud de la France. Solitaire et taiseux, son visage ne s’éclaire que dans les cours de récréation, au milieu des cris de joie des enfants. En ce début de week-end de Pentecôte, il se retrouve avec un de ses élèves, Mathias, dont les parents sont divorcés et le père ne sait que faire.
Baptiste accepte d’emmener le garçon voir sa mère, serveuse saisonnière sur une plage touristique. Sandra est belle, forte, fragile, déterminée, endettée, un peu paumée. Ensemble, dans un souci à la fois doux et inquiet d’attention réciproque, ils vont devoir affronter le passé douloureux de Baptiste pour mieux se tourner vers un avenir où il sera possible de vivre, enfin.
Le septième long-métrage de la réalisatrice Nicole Garcia est de ces films étonnants, qui vous désarment après coup. Vous en sortez à la fois sonné et serein, silencieux et vaguement fasciné, sans savoir par quoi. Mais ici, en sachant par qui.
Nicole Garcia filme son fils avec amour
Nicole Garcia filme toujours avec un classicisme brillant et une attention bienveillante ses personnages. Dans « Un beau dimanche », elle a choisi de mettre sous l’œil attentif de la caméra et d’elle-même son propre fils, Pierre Rochefort, révélation à la fois sobre et puissante de ce film au charme à retardement.
Car elle est douée, Nicole Garcia, pour nous désarmer par sa maîtrise. Ainsi, la scission du film s’avérait risquée, et aurait pu frôler la caricature ou le jugement. Il n’en est rien. Après une rencontre simple et la chaleur d’une plage d’été, le spectateur se trouve happé par le carcan familial de Baptiste, demeure de la grande bourgeoisie, et par la froideur ethnocentrée de sa mère, jouée par la grande Dominique Sanda, absente des écrans depuis longtemps. La confrontation tant évitée est inéluctable, la décision de Baptiste, inébranlable.
De son héros tourmenté, qu’elle filme avec un amour non dissimulé, elle en fait en un clin d’œil un personnage immédiatement attachant, dont on sent le mystère et le secret gardé à chaque plan. Pierre Rochefort, tout en colère rentrée, est sublime de force et de douleur.
La beauté touchante d'un film sans prétention
De son héroïne populaire, elle fait une femme fière et frondeuse, qui accepte avec intégrité cette aide soudaine, inestimable, sincère. Louise Bourgoin y est convaincante et émouvante, une véritable actrice, si certains en doutait encore.
Ce film tout en pudeur évite les écueils d’un scénario plongeant au cœur de la lutte des classes et d’un secret de famille, grâce au talent de sa réalisatrice. Rencontrée en conférence de presse, Nicole Garcia m’a envoûtée par sa voix grave reconnaissable entre mille, et a reconnu avec tendresse qu’« en regardant vivre son fils, il émanait de lui des contradictions, et qu’il possédait une épaisseur romanesque », qu’elle nous donne ainsi à voir, simplement, dans la beauté touchante d’un film sans prétention.
« Un beau dimanche », un film de Nicole Garcia, à voir au Katorza, au Gaumont et à l’UGC.
un beau dimanche
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Article réalisé par Elsa Gambin
Publication : Mercredi 12 FéVrier 2014
Illustration : Pierre Rochefort, Nicole Garcia et Louise Bourgoin