Shannon Wright à fleur de peau
La nuit, le froid et un (petit) bout du monde : aller à St Nazaire pour un concert relève parfois du défi. La ville s’étend sur le vide, là où tout commence et où tout finit, entre le béton et la mer...
C’est là que Shannon Wright a décidé de se produire, au VIP, 4 ans après sa dernière venue dans l’Ouest.
On se souvient des premiers albums de Shannon Wright, de la fureur et du désespoir, de ce piano magistral et des riffs rageurs. A l’époque, Shannon Wright donnait tout sans aucune retenue, martelait les touches de son instrument, chantait et criait son mal-être tout au long de ses morceaux.
Si la rage est toujours là, l’artiste semble aujourd’hui avoir dompté le mal et diffuse des titres tout en nuances, maîtrisés de bout en bout.
Shannon Wright ne va pas mieux, non. Tournée dos au public, cachée derrière une tignasse rebelle et des lèvres rouge vif, l’artiste se réfugie sur son piano dès qu’elle le peut. On aperçoit à peine le reflet de sa bouche dans le miroir qu’offre son instrument… On ne verra jamais ses yeux pendant les 1h30 de son set. L’armée de photographes présents se donne bien du mal pour capturer l’instant. Mais la bête vit cachée.
Elle se balance comme une autiste sur des morceaux-complaintes, puis se dresse l’instant d’après pour plaquer avec fureur des accords sur l’instrument martyr. Entourée de musiciens fantômes (et fantoches ?), Shannon happe tout sur son passage. Elle danse accrochée à sa guitare, se rapprochant brièvement de son micro pour distiller son chant, personnage au corps frêle et à la bouche immense, hydre à 2 têtes, insaisissable et définitivement rock.
Ce concert est un plongeon dans la psyché de l’artiste, et dans son dernier album d’une beauté noire. « Division » se dévoile au fil des écoutes, s’infiltre dans votre cœur et dans votre âme, habite l’espace, séduit au fil du temps… Les compositions sont minimalistes, parfois assorties d’arrangements électroniques discrets. Une musique en clair-obscur, telle le portrait de l’artiste, qu’on découvre en photo sur la pochette intérieure du vinyle.
Sur scène, Shannon Wright continue de se débattre avec ses démons, fragile et animale, s’adressant à un autre invisible mais omniprésent. « Let me be » chante l’artiste au loin, poursuivant sa lutte intérieure, tour à tour caressante et véhémente. Loin d’être indifférente à l’intensité des émotions qu’elle libère, l’artiste remerciera généreusement son public avec un rappel et de nouveaux morceaux à fleur de peau.
On ne regrettera pas cette fois-ci d’avoir roulé jusqu’au bout du monde.
Nouvel album "Division" à écouter ici.
Photo par Caroline CHAFFIRAUD, prise le 24 février 2017 au VIP @ St Nazaire.
shannon wright / rock / concert / live / vip saint-nazaire
Article réalisé par Bérengère Vito
Publication : Mardi 28 FéVrier 2017
Illustration : Shannon Wright au VIP à St Nazaire
Crédit photo : Caroline CHAFFIRAUD