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La vie d'Adèle : du cinéma cru et criant de vérité

Adèle adéalisée, Kechiche sacralisé, nous offrent un vertige de cinéma. La vie d'Adèle Chapitres 1 & 2 mérite, très certainement, la triple Palme d'or attribuée au dernier festival de Cannes.

Photo tiré du film La Vie d'Adèle

Adèle a 15 ans. Dans le film. Adèle a 19 ans. Dans la vie. 

Adèle Exarchopoulos, femme naissante, se confond avec son personnage, avide de vivre tout ce qu’il y a à vivre. Adèle grandit, mûrit, vieillit sous nos yeux ébahis, Adèle s’épanouit, s’émancipe, se construit, survit à une passion, de celles qui vous marquent au fer rouge, de celles qui vous façonnent, qui vous assomment, qui vous bastonnent le cœur et le corps, qui vous laissent sur le bord de la route avec des bleus à l’âme, mais après tout, comme le souligne la bande-dessinée dont est inspiré le film : le bleu est une couleur chaude . 

Adèle, l'intemporelle, l'universelle

Adèle doit donc faire avec son vague à l’âme et ses bleus au cœur. Adèle a tous les âges, toutes les envies, tous les désirs de tous les âges de la vie. Adèle et sa vie ont fait couler beaucoup d’encre. 
Si je prends, moi aussi, la plume, noyée comme tant d’autres dans un émerveillement vertigineux, c’est parce que cela mérite encore une fois d’être souligné : Adèle est intemporelle. Adèle est universelle. 
Je veux remettre sur son chemin la vie d’Adèle, et son chemin est celui, et uniquement celui, du septième art. 

Oubliez la polémique, les phrases assassines et les règlements de comptes. Ne voyez que le film, tel qu’il est, à l’état brut, une pépite de cinéma, comme en son temps « À nos amours » de Maurice Pialat. 
Avant tout une histoire de transition, de ce passage si délicat de l’enfance à l’âge adulte, avec cette accentuation sur l’adolescence titubante, toujours sur le fil du rasoir, au bord du précipice, à fleur de peau. Avant tout une histoire de peau justement, une histoire d’amour, filmée au plus près des corps, des visages, des émotions. De la peau de l’autre comme exutoire exalté, comme échappatoire incontrôlée, comme apprentissage intellectuel, aussi. 

Le quotidien en gros plans

Cinéaste de l’intime, Kechiche cadre constamment le quotidien en gros plan, et nous offre (car il s’agit bien d’une offrande) cette sensation irrationnelle et pourtant palpable d’être là, avec elle. Plastiquement impeccables, la magnificence des séquences nous laissent pantois, où comment donner, avec une intensité maîtrisée de cinéaste accompli, aux gestes anodins de tous les jours un écrin de réalisme suffocant et tendre à la fois. 
La passion des corps, si décriée, que le cinéaste donne à voir crûment et dans toute sa splendeur, est nécessaire à la force du film, le spectateur est saisi par ce désir trivial, cet abandon total, cette rage de vivre. 
La déliquescence de la maîtrise de soi devient un hymne à la chair et à l’amour, mis en image comme peu de cinéastes savent (osent ?) le faire. 

Cinéaste de la transmission, Kechiche nous livre également sa vision du monde, qui selon lui passe par le savoir, la découverte, l’enrichissement culturel. Adèle apprend aux côtés d’Emma (Léa Seydoux) l’art de la peinture et de la sexualité, Adèle institutrice transmet son savoir à la génération suivante encore innocente des affres de la vie, mais par-dessus tout Adèle apprend seule en se cognant à cette même vie. 

Un film de toutes les exagérations

Bouleversante de naturel, la jeune Adèle Exarchopoulos nous donne à voir un jeu bluffant de sensibilité et de sensualité, presque sincèrement inconsciente de sa beauté en pleine éclosion, s’excusant presque d’être désirable et désirée, encore auréolée des rondeurs joufflues et des gestes maladroits de l’adolescence.
 Film de toutes les exagérations, de toutes les extrapolations, 750 heures de rushes condensées en trois heures, première triple distinction de l’histoire cannoise, un tournage chaotique et épuisant dénoncé par les actrices, un réalisateur blessé, qui s’estime « sali », La vie d’Adèle, par son ampleur universelle, par sa vérité crue où chacun peut se reconnaître, fait un pied de nez à tout ce qui l’entoure, sans jamais l’entacher.
Car, et c’est tant mieux, le cinéma réussit à prendre le dessus, arguant insolemment, revendiquant à juste titre que la fiction est ce qu’elle est, indépendante et salvatrice, dominatrice dans sa liberté d’expression, face à l’inconsistance de la polémique des Hommes.  


cinéma / la vie d'adèle / homosexualité

Article réalisé par Elsa Gambin

Publication : Lundi 14 Octobre 2013

Illustration : Photo tiré du film La Vie d'Adèle

Crédit photo : La Vie d'Adèle






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