Bienvenue sur le site de Prun'. En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l’utilisation de cookies. Ok
Cover

Chargement...

¯\_(ツ)_/¯

La Croisette d'Elsa -Journal d'une cannoise éphémère, Jour 3

Et tout semble fluide...ou presque ! Retour notamment sur le très réussi "Bande de Filles" de Céline Sciamma.

Les actrices de

Jour 3. Jeudi 15 Mai. 

Levée à 6h, descendre la ville à pieds, encore, toujours pas de bus... Je me précipite pour voir le dernier film de Céline Sciamma, "Bande de filles", sélectionné dans l'excellente section parallèle La quinzaine des réalisateurs. La cinéaste revient à Cannes pour la troisième fois, juste après la fin de la controverse "Tomboy". 
Derrière moi dans la salle du théâtre de la croisette, la jeune réalisatrice Rébecca Zlotowski ("Grand central"), amie de Céline Sciamma. Elle rit joliment de sa voix grave pendant la projection, applaudit fortement à la fin en criant "Bravo !". 

Je suis envoûtée par la justesse du film, par l'énergie folle et la rage de vivre de ces adolescentes. La cinéaste suit la quête identitaire et la soif d'émancipation d'une jeune fille de 16 ans, le parcours est à la fois chaotique et constructif et la beauté de certaines scènes laisse sans voix. Céline Sciamma ou l'art de faire sur la chanson "Diamonds" de Rihanna une des plus belles scènes de cinéma qu'il m'ait été donnée de voir depuis des mois. 
La salle est conquise, le talent de Céline Sciamma, issue de la FEMIS, définitivement confirmé. Elle apparaît sur scène ensuite, pour un échange avec le public. Les spectateurs cherchent des réponses, là où il faut seulement écouter ses émotions et sa propre interprétation.  J'apprécie le regard tendre qu'elle pose sur ses comédiennes. Je quitte la salle, comblée par le 7ème art. 

Je maîtrise maintenant le temps d'attente nécessaire pour les films selon les salles, les logos des files d'attente, le bord de mer, les étages du grand palais. Me mouvoir est plus aisé, et pourtant il me reste tant à découvrir. Je déjeune sur le pouce face à la mer, qui a gagné en teinte chaude et bleutée comparée à celle de la Bretagne. Les bateaux de croisière stationnent au loin, le ciel est une carte postale. Je n'ai pas le temps d'écrire que déjà j'attends pour un second film, en compétition dans la section "Un certain regard". Un film Israélien, sur le difficile sujet de l'inceste, mal traduit "Loin de mon père". 

L'âpreté trash de "Loin de mon père"

J'y vais un peu dubitative, la grande salle Debussy est comble, le jury présent. Certains spectateurs quittent la salle au bout de trente minutes, devant la crudité sèche des scènes de sexe entre le père et sa fille. L'insoutenable est pourtant tenu à distance par des personnages sans profondeur psychologique et une mise en scène trop clinique, sans doute réfléchie, mais austère. Les scarifications et la boulimie de l'héroïne "incestée" auront encore raison d'un certain nombre de personnes. Je tiens jusqu'au bout, à la fois ébranlée et étrangement distanciée du propos. La lumière se rallume sur un silence de mort, suivi de quatre applaudissements furtifs, et un "Boooouh" retentissant. 

L'âpreté trash du film, puis l'aveuglant soleil de la côte d'azur, me sortent de ma torpeur. Je rejoins une collègue parisienne, qui bosse pour un web magazine culturel, elle aussi bénévole, elle aussi Force Jaune. Le réconfort viendra d'un petit coin de Paradis, au nom prometteur de "Plage Magnum".  Soit un de ces grands bungalows de plage installés les pieds dans l'eau, où sur présentation du badge presse, tu as le privilège de déguster gratuitement le Magnum de ton choix, que l'hôtesse, complète sous tes yeux de mille assortiments farfelus, sobrement appelés "Gold flakes" ou "Popping Candy", après avoir plongé la glace dans du chocolat fondu. Et la journaliste, néophyte de Cannes, se retrouve à déguster un Magnum multicolore, nappé de chocolat blanc, sur des poufs confortables face à l'océan, dans un bungalow en bois rempli de canapé beige, de coussins moelleux et de ballons blancs au plafond. 

Cannes, le marché mondial du film 

L'idée nous vint ensuite d'aller écrire, et nous errons dans les recoins derrière le Palais à la recherche d'un endroit serein. Les recoins en question nous mènent en fait au Village International, au Marché du film, à une véritable balade dans une multitude de huttes blanches multiculturelles. Nous y croisons entre deux verres de vin, un réalisateur italien, de très jeunes réalisateurs de court-métrages, la Maison des scénaristes, le yacht des soirées Arte, et tentons de grappiller des invitations pour la soirée Canal + (LA soirée), malheureusement complète depuis longtemps. 

Les rencontres sont imprévues, parfois drôles, parfois barbantes. En amont des films eux-mêmes gravite donc tout un monde d'exploitants, de scénaristes, de cinéastes, de distributeurs, de producteurs.  Cannes demeure l'un des trois plus grands marchés du film au monde.  Les coulisses sont tout aussi passionnantes, il s'y passe mille soirées, dans notre tâtonnement de débutantes festivalières, nos oreilles sont grandes ouvertes, chacun y va de son tuyau et de ses bons plans, se glisser dans les grands hôtels, se faufiler aux soirées sur les plages, mendier des invitations à droite à gauche. La réalité est plus complexe, mais assez fascinante et imperturbablement envoûtante : découvrir des films et errer avec délectations au cœur du festival lui-même, pour enfin en maîtriser les rouages. Tant de choses à voir encore... 
La soirée s'est achevée avec une promenade nocturne sur la croisette. La jeunesse se déhanche  en costards et talons à la Lady Gaga, les voitures aux vitres teintées déambulent, ça se bouscule sur le tapis rouge, et un feu d'artifice phénoménal explose au-dessus des yachts. Enfin, Chiara Mastroianni  monte sur la scène démesurée du "cinéma de la plage", une estrade gigantesque, un écran géant tendu devant la mer et des rangées de transats à même le sable. Ce soir, Fellini est à l'honneur avec "Otto e mezzo",  le père de l'actrice, star de l'affiche, en vedette. 
Indubitablement, nous sommes ici coupés du monde et de la vie réelle. 

 À voir absolument "Tomboy", en DVD et "Bande de filles", sortie prévue en Octobre 2014. 


festival de cannes / cannes 2014 / bande de filles / céline sciamma

Article réalisé par Elsa Gambin

Publication : Vendredi 16 Mai 2014

Illustration : Les actrices de "Bande de Filles" de Céline Sciamma

Crédit photo : Bande de Filles film






Réagir :