Enquête : le CID à Nantes, une fin prévisible ?
Le CID-Origi'Nantes (Centre Interculturel de Documentation) a été liquidé fin mars dernier. Mais était-ce si imprévisible et soudain qu'annoncé par les gestionnaires ?
Ces derniers mois, trois articles et une tribune ont été publiés dans Presse Océan et Ouest France sur la situation du Centre Interculturel de Documentation (CID-Origi'Nantes). Notamment sur sa situation financière ; j'étais censé faire un papier sur la souffrance au travail vécue par de nombreux salariés passés par cette structure et mettre en lumière les risques et les conséquences sanitaires des salariés du secteur associatif.
Une chose qui arrive à force de mélanger le militantisme, les heures non-payées et le manque de professionnalisme des dirigeants du secteur (tout simplement parce qu'ils ne sont pas formés ou encore bénévoles).
Je me suis, non pas ravisé, mais j'ai tout simplement changé d'angle suite à ces lectures.
Ces articles dans la presse locale relatent les faits en surface avec une absence de clarté quant au rôle joué par le Conseil d'Administration et le Bureau sur la responsabilité de cette défaillance.
Deux entités dirigeantes qui n'hésitent pas à désigner l'ancienne directrice, Aïcha Boutaleb, comme seule fautive. L'analyse faite se penche, donc, sur les conséquences, et reste floue concernant les causes, qui dépassent le simple aspect financier de cette liquidation de l'association (prononcée fin mars 2017). Cette issue englobe un ensemble de facteurs et d’acteurs d'autant plus large qu'on ne comprend pas la conclusion du tribunal. Le CID a plus de trente ans, a développé de nombreux projets et possède un fond documentaire riche et varié dont on ne connaît pas l'avenir.
Il est aussi expliqué qu'« après une levée de boucliers de salariés mécontents de son management (la directrice). Un travail de médiation avait pu ramener le calme »(OF le 12 mars 2017), la médiation a bien eu lieu, mais pour le « calme » cela n'est pas l'avis de salariés partis depuis ou même de ceux qui se sont mis en arrêt maladie quelques mois après la dite médiation.
Là aussi, cela manque de précisions : « mécontents » mais pourquoi ? Se sont-ils fâchés ? Ont-ils mené une guerre sans merci contre leur hiérarchie, ou ont-ils simplement défendu leur position, l’association et leur santé ?
Certains parmi eux ont, semble-t-il, essuyé les divers affronts d'un management maladroit, autoritaire et désordonné. Mais après tout, si les dirigeants (Conseil d’Administration et Bureau) ne mouftent pas, pourquoi changer de méthode ?
J'ai pu noter, tout comme la médecine et l'inspection du travail, une réelle souffrance liée à leur salariat au CID qui n'a pas manqué d’abîmer la santé de certains, les amenant à la dépression, isolement social, fatigue nerveuse, burn out....
Ces articles de presse toujours, font état d'un naufrage financier rapide et fulgurant que le Conseil d'Administration «n'aurait pas vu avant l’absence de fonds pour payer les salaires ». Le premier retard de paiement concernerait le mois de novembre 2016, mais certains échanges et documents internes annonçaient déjà la couleur avant.
Mercredi 05 avril 2017, après la décision du tribunal et dans une tribune publiée dans Ouest France, trois anciens (administrateurs et président) de l'association, toujours actifs à leur manière, se posent la question de la responsabilité collective.
Voici donc la chronique d'un désastre annoncé.
Premières alertes en 2014
Pour le contexte, faisons un bond rapide en arrière pour revenir à l'hiver 2013, Aïcha Boutaleb est alors présidente du CID.
Les valeurs de l’association selon le site internet sont « les mêmes [...] depuis sa création, à savoir, la solidarité, le vivre ensemble, la lutte contre les discriminations, la lutte contre le racisme et la xénophobie, la sensibilisation et la connaissance de la culture de l’Autre, l’accompagnement et le soutien des associations issues de l’immigration ».
On y trouve de jolis mots et de chouettes projets ; ce qui se serait déroulé en interne semble donc se situer aux antipodes de ce vocabulaire empreint d’espérance et de volonté à vivre ensemble.
En février 2014, plusieurs dysfonctionnements sont soulevés par quatre salariés de l'époque, à travers un courrier détaillé envoyé au Conseil d'Administration (CA), s'appuyant sur le Diagnostic Local d’Accompagnement de Catalys daté du 31 décembre 2013. Ce diagnostic semblerait avoir conditionné le versement d'une partie de la subvention annuelle de la municipalité à la suite.
Le CID n'a, à ce moment là, plus de direction salariée et est géré par des bénévoles (Bureau et CA) qui ont eux aussi un travail, voire plusieurs engagements associatifs en même temps, parfois dans le même réseau, ce qui provoque un manque de temps et semble amener certains problèmes de gestion du projet.
Dans ce courrier de début 2014, on trouve pèle mêle ce type de reproches :
« absence de comptabilité pendant quatre mois en 2013 et 2014 » (les comptes ne sont pas déposés depuis 2013 au journal officiel et toujours aujourd'hui), « erreurs sur les bulletins de salaire », « absence de règlement intérieur et d'organigramme », « contrats signés avec retards », « incohérence des fiche de postes »…
Ce qui peut arriver fréquemment dans l’associatif ; la professionnalisation grandissante du secteur dès le début des années 90 pose ces problèmes récurrents en matière de management et de gestion RH.
Suite à une interview, le Syndicat du Travail Associatif désigne le secteur comme étant « un laboratoire du travail précaire » par la multiplication des contrats jeunes, aidés, etc. Interrogé sur la souffrance au travail, le syndicat cite le CID parmi d'autres associations nantaises.
Ces reproches, le CA y répond de cette manière dans la réponse faite au courrier des salariés en avril 2014 :
« Sachez que les membres du CA sont bénévoles et salariés dans d’autres structures, et que nous faisons au mieux pour être présents parmi vous afin de fixer le cadre, de vous accompagner et répondre aux besoins de chacun. »
Il ajoute à ces explications l’absence d'un poste de direction et de secrétaire comptable ainsi que des questionnements d'ordre financiers :
« Nous devons cependant trouver d’autres modes de financements en particulier dans le privé, en attendant les financements publics nous permettent de mettre en œuvre les actions et financer le fonctionnement de notre structure, vos salaires compris. »
Il y est expliqué sur les budgets que le « CA est le garant du respect des orientations du projet associatif, de l’éthique et des valeurs de l’association, de l’utilisation des moyens, du respect des budgets ».
Concernant l'organigramme et dans l'attente de ces deux postes :
« Seule la responsable, lorsqu’elle sera en poste, aura une délégation de pouvoir du CA, ce qui permettra d’avancer nos actions sereinement. L’équipe salariée n’a pas à avoir de délégation de pouvoir du CA, seul un responsable peut l’avoir. En attendant, se sont Fatima Sékhaï et Aïcha Boutaleb qui assureront le suivi des différentes demandes, dépenses, contrats, prestations, salaires, etc. Cependant, les salariés et c’est ce qui se passe actuellement, ont toute liberté d’initiative tant que cela va dans le sens du projet associatif et ne porte pas préjudice à notre structure. Les dépenses importantes, les contrats de travail, les prestations sont à faire valider par le bureau et le CA. »
Bien que ce document date de 2014, on peut y voir la naissance des questionnements sur la gestion financière à venir.
Plus tard, toujours en 2014, deux des quatre salariés ayant alerté le Conseil d'Administration et le Bureau partent dans des conditions dites tendues.
Dans le même temps, une partie du nom actuel du CID aurait été achetée à l'un des salarié sortant (pour un montant de 4500€). Aïcha Boutaleb, interrogée, n'a pas souhaité répondre à ce sujet.
Le Centre Interculturel de Documentation devient alors le « CID-Origi'Nantes », et a pour objectif la mutualisation d’associations ou collectifs, le partage de compétences pour devenir, selon le communiqué de presse, un « Centre Inter associatif actif ».
Pour autant, l’association « Origi'Nantes », d'où provient le nom, existe toujours, malgré cette "fusion", et ce depuis 2010, et n'a vu aucun changement ni modification de statuts au Journal Officiel des Association.
Juillet 2014 : la Mairie met à disposition un agent de la ville.
Une convention de mise à disposition d'agent territorial est signée entre la ville et le CA du CID. Ceci permet à Mme Boutaleb de quitter la présidence du CID et sa mission d'agent à la mairie de Nantes pour occuper le poste de directrice du CID-Origi'Nantes.
Ce type de convention concerne habituellement les associations déclarées d’intérêt général ou en délégation de service public. On retrouve cette notion dans le préambule de la convention pour la justifier.
Il est décrété que :
« l’association CID est au service de l'interculturalité, du mieux vivre ensemble. Elle a pour objet d'alimenter la connaissance sur les phénomènes migratoires et les questions qui en découlent, et, a élargi son champ d'action à la formation, l'organisation de colloques, de conférences… » « Prenant en considération l’intérêt général que présentent pour les nantais l'objet et les actions poursuivis par l’association CID, la Ville de Nantes a décidé de soutenir l’association, notamment par l'attribution d’une subvention de fonctionnement ainsi qu'une mise à disposition de personnel ».
Des problèmes structurels récurrents.
En décembre 2014 d'abord, la situation étant toujours conflictuelle au sein de l'association, plusieurs salariés demandent à la directrice l'intervention d'un médiateur extérieur. C'est d'abord une coach en management qui est engagée au premier semestre 2015 pour déminer les problèmes, avec le coût que cela comporte.
Puis en Juin 2015, après l'assemblée générale, M. Peetson, un ancien président du CID, émet quelques réserves :
« Assemblée générale mal préparée », « comptable salarié qui présente le rapport financier, pourquoi pas le trésorier ? », « la fusion CID-Origi'Nantes n'a pas été évoquée, qu'en est il ? »
Il précise malgré tout qu'Aïcha Boutaleb a su faire évoluer le CID mais il n'est pas convaincu par l'idée qu'elle seule a œuvré pour l’association qui était déjà en grave difficulté auparavant (78000 euros de déficit cumulé en 2010 ).
À cela s'ajoute l'intervention du commissaire aux comptes lors de cette l'AG. Il émet l'idée d'une procédure d'alerte dans le cas où les comptes ne seraient pas mieux tenus.
Été 2015 : le malaise persiste en interne
Commence alors le bal des arrêts maladies, les différents témoignages sont raccords, il est reproché à la direction dans un nouveau courrier au CA (rédigé et signé par six salariés) :
« agressivité, violence verbale, harcèlement psychologique, humiliations, menaces, rumeurs malsaines colportées, stratégie de division, mauvaise gestion des salariés, engagements non tenus, mélange entre la vie personnelle et professionnelle, refus de déléguer et fuite devant les responsabilités en ce qui concerne la gestion des ressources humaines. »
Pour ce qui est du financier, les signataires pointent du doigt la mise en place « d'actions non budgétisées et d'actions sans accord de financement, dépenses excessives »….
Lors de l'échange avec Mme Boutaleb elle dément en bloc, parle de « cabale » voir de tentative de prise de pouvoir.
Une défiance s'installe alors entre la Présidente, Yasmina Abid, et les salariés quant à la véracité des arrêts de travail. Ils proposent une contre expertise médicale pour attester définitivement du mal-être vécu au sein de l'association.
Septembre 2015 : la Mairie dans la balance
Certains préfèrent partir pour se préserver et tourner la page, et expliquent clairement les raisons du départ en lien direct avec le mal-être vécu dans la structure. Le plus souvent ils décident de laisser se finir les contrats sans chercher à les renouveler ou de faire une rupture conventionnelle, qui ont, elles aussi, un coût.
Devant l'immobilisme apparent du CA, les salariés décident en groupe de passer à la vitesse supérieure ; au delà de leur santé, il est émis de nombreux doutes quant à la gestion financière de la structure, pourquoi leur discours n'a pas été entendu (ou plutôt écouté) à ce moment ? Est ce que les instances dirigeantes (et néanmoins bénévoles) n'ont pas soumis à vérification les flux de trésorerie ?
Un courrier est finalement envoyé en mairie, employeur de la directrice et qui possède le pouvoir disciplinaire selon l'article 5 de la convention de mise à disposition :
« Le Maire de la Ville de Nantes exerce le pouvoir disciplinaire. En cas de manquement aux obligations ou de faute de l’agent dans l'accomplissement de ses missions pouvant justifier une sanction, l’Association saisira par un rapport motivé, la Ville de Nantes. »
Une demande écrite de la présidente de l'association, qui est alors Mme Abid, doit être formulée pour que la ville intervienne. Il nous est impossible de préciser si cette demande a été faite, Madame Abid ayant refusée tout entretien.
Les services internes de la Mairie de Nantes (cabinet de Mr Leray) ont eu quelques échanges téléphoniques avec ces salariés « mécontents » sans jamais accepter une rencontre, expliquent-ils.
La directrice est, à ce moment, temporairement « mise de côté » par les dirigeants du CID, le temps pour eux d'y voir, certainement, plus clair. Ils justifient cette absence par des « congés » auprès des salariés .
Nous n’avons pas pu avoir plus de détails du côté des anciens et nouveaux membres au Conseil d'Administration là-dessus. En effet, peu d'entre eux ont répondu ou ont simplement refusé mon invitation à un éventuel entretien contradictoire.
La directrice envoie un mail le 20 octobre 2015 au CA expliquant son mal être. Plusieurs malaises sont à déplorer de son côté également et elle y manifeste son désir de partir au vue du déroulement des faits. Une forme d'ultimatum démissionnaire. Ce mail fustige l’action des salariés tout en précisant son action salvatrice à propos du redressement des finances de l'association.
Cette situation prendra fin, la directrice reviendra, sans porter plainte contre les salariés, pour diffamation, comme indiqué dans son mail sus-mentionné.
Sa « réintégration » intervient quelques semaines plus tard après un rendez-vous avec les élus concernés à la mairie.
Extraits du mail envoyé par la directrice au CA, précisant les tensions et désaccords avec les salariés :
« Depuis cet été 2015, je subis une cabale contre moi, et je le répète, contre moi mais qui porte aussi préjudice au projet Cid. J’ai été insultée, dénigrée, humiliée et accusée par une grande partie de l’équipe manipulée par deux personnes mais j’imagine qu’une tiers personne agit avec eux contre moi.
Depuis sept semaines, vous êtes rentrés dans un processus de discussion, de dialogue, de médiation avec ces salariés, mais aucune notification pour fautes professionnelles ne leur a été adressée. […]
La coordinatrice, en CDI, en arrêt maladie jusqu’au 16/10/2015 est en vacances actuellement. C’est sur ce poste que nous risquons d’avoir plus de soucis en sachant qu’elle souhaite rester au CID.
Comme vous le remarquez, je ne prononce pas leur nom car pour moi, ils n’existent plus. Ce qu’ils ont engagé dans leur démarche est intolérable, qu’ils m’attaquent, ce n’est pas un problème, qu’ils manquent de respect au CA, aux membres du bureau en sachant que vous avez tout mis en œuvre pour assainir la situation, n’est pas acceptable ; les salariés en arrêt maladie continuent à aller à l’encontre du CID. S
ans compter qu’une personne s’est présentée au cabinet du Maire et au CID, en disant qu’elle était le médiateur des salariés. Cette personne connaît tout du dossier Cid et du conflit avec les salariés. Franck et Yasmina (membre du CA) ont rencontré l’inspection du travail jeudi 15 octobre afin de discuter de la situation »
Personne ne pourra vérifier preuves à l'appui de l'identité du «médiateur mystère ».
Un rapport du CA du 03 novembre 2015 précise :
« 2.Rencontre avec la Ville de Nantes : Yasmina Abid a fait part de son entretien avec Élisabeth Lefranc, adjointe au maire chargée du personnel et Sébastien Leray, directeur, du département Vie sociale, Citoyenneté et Territoires de la Ville de Nantes. La Ville de Nantes, interpellée par les salariés, avait demandé -par courrier recommandé- un rapport sur la situation. Des éléments d’information lui seront transmis au fur et à mesure de la résolution du conflit ».
Pour en savoir plus j'ai tenté de contacter les élus concernés. Mme Bassal a répondu, enfin non, le service presse plutôt, après seize tentatives téléphoniques entre mai et octobre 2016. J'ai obtenu cette réponse :
« la mairie n’intervient pas dans les ressources humaines des associations subventionnées »
Le bureau de Mr Leray et de Mme Lefranc n'ont pas répondu à mes sollicitations d'entretien.
Décembre 2015 : une nouvelle médiation
Une nouvelle médiation débute en décembre 2015, après cette deuxième alerte collective et suite aux échanges avec l'ARACT (agence régionale pour l’amélioration des conditions de travail) interpellée par les salariés.
Mais elle ne changera finalement pas grand-chose. En effet quatre salariés sur les six signataires de la deuxième alerte au CA sont partis, et des dispositifs maladroits sont mis en place comme la pointeuse, à la demande de l'inspection du travail.
Un salarié prévient une nouvelle fois l'inspection du travail par mail de l’absence d'évaluation des risques psycho-sociaux ; il doit s'agir d'un oubli.
À cela viendrait s'ajouter une forme de harcèlement selon les salariés (non reconnue légalement et aucune plainte n'a été déposée), traduit par des remarques injustifiées, agressives et une mise à l'écart par le retrait de droit d'administration d'usage des outils internes de l'association.
Début 2016, c'est le comptable qui est en arrêt maladie, ce jusqu'à la fin de son contrat. Un nouveau comptable est engagé mais la remplaçante qui aurait également très mal vécu son poste finira par démissionner tant la tension est difficile à vivre.
Suite, à ce qui paraît aux yeux des salariés comme de l’immobilisme, Mr Guiheneuf, ancien salarié, envoi un recommandé au mois de février 2016 à Madame le Maire. Recommandé qui reste aujourd'hui encore sans réponse malgré les relances.
Une situation que l'on a pas vu ou que l'on a pas voulu voir ?
Revenons aux finances : Le rapport du CA du 08 février 2016 explique les comptes 2015 de cette manière :
« 5. Pour l’année 2015, sous réserves de la notification de l’expert-comptable, on devrait finir l’année avec un excédent de près de 30 000 €. Il restera néanmoins à solder le remboursement de la Ville pour la mise à disposition du poste d’Aïcha Boutaleb (40 000 €). La demande de subvention exceptionnelle à l’État de 30 000 € a eu un accord de principe du national (à suivre aussi du côté des services décentralisés de l’État). »
La ligne du dessous indique :
« 6 . - Questions diverses : Le CA donne son accord de principe de rémunérer le travail photographique de Thierry Mézerette sur le projet Origi’Nantes dans le cadre de la programmation Les Héritiers. »
M. Mézerette, trésorier au bureau et sollicité a plusieurs reprises n'a pas souhaité donner suite, ne souhaitant pas répondre une première fois sur le sujet, se déclarant à l’étranger la seconde fois et qui ne répondra pas à mes appels dans un troisième temps.
Pendant ce temps un contrôle d'URSSAF apparaît sur le compte rendu de CR du 30 mars 2016, un redressement est alors notifié en rapport avec les problèmes RH évoqués plus tôt. Redressement que certains salariés qualifieront de « salé ».
Juin 2016 , un échange par mail entre le président et la comptabilité fait état de plusieurs avances ou prélèvements à titre personnel. Ces avances concerneraient les sujétions (déplacements et frais annexes) de l'agent mis à disposition par la Mairie (dépenses contraintes liées au poste) que l'on retrouve aisément dans la convention (article 7 rémunération) :
« l'agent pourra être indemnisé par l’association des frais et sujétions auxquels il s'exposera dans l'exercice de ses fonctions suivant les règles en vigueur au sein de l’association, en application de l'article 9 du décret précité relatif à la mise à disposition »
Rien d'illégal. On parle ici de 200 euros par mois, mais un mail de la comptabilité envoyé au président, en date du 27 juin, précise les avances d'un montant de 2137.36€ et évoque « un prêt de 2020.00 », plus loin, je cite : « juridiquement, elle n'a pas le droit de s'octroyer cela, les statuts de l’association ne l'autorisent pas... ».
Plus tard, en octobre 2016, ce prêt est à nouveau évoqué par la comptabilité: « […] deux options : la 1ère le remboursement partiel directement pour faire preuve de bonne foi, non par une tierce personne et la deuxième de mettre cela en dette sociale du CID ».
À cette heure nous ne connaissons pas l'option choisie.
Alors pourquoi ne pas tout éplucher tandis que l'on a un professionnel entre les mains, alors que l'expert comptable et le commissaire aux comptes demandent expressément des renseignements sur des lignes floues concernant l'argent public et les subventions ? On se demande aussi pourquoi la municipalité n'a pas demandé à ce que les comptes soient publiés étant donné le montant des subventions.
Des renforts financiers importants
En juin 2016, une subvention supplémentaire de 40 000 € est versée. Celle-ci, votée en conseil municipal dans la case divers, est inscrite au procès verbal mais ne sera pas citée de vive voix par Pascal Bolo sur la vidéo du conseil diffusée par le conseil municipal. Elle s'ajoute au 84 000 déjà versés en mars de la même année.
Le rapport moral 2016 du président Franck Barrau indique ceci :
[...]Pour ce faire, nous avons renforcé l'équipe permanente après quelques turbulences que nous avons dépassés entre la fin de l'année 2015 et le début de cette année...et plus loin : Grâce à eux (les financeurs dont la ville de Nantes, l’État et la région), malgré un contexte général de contraction budgétaire, nous avons pu agir tout au long de l'année 2015 et, dans le même temps, nous avons réussi à résorber la dette qui était celle du CID, il y a trois ans. La situation reste fragile faute de fonds propres mais elle est saine.
Il y a t il eu une volonté de cacher ou de maquiller les faits ? Ces « turbulences » ont affecté la santé de nombreuses personnes, ne sont alors pas « dépassées » et ne s'arrêtent pas là.
Par ailleurs le nombre d'adhérents a plus que chuté depuis ces dernières années et l'AG 2016 du CID peine à réunir plus de dix personnes (Mme Boutaleb accusera un manque de communication et une date choisie trop vite pour justifier le peu de participants) pour la présentation de ce rapport esthétique mais quelque peu erroné au vue du climat encore pesant chez certains salariés à ce moment là et sur la fin 2016.
M. Barrau a répondu à ma demande d'entretien téléphonique en mai 2016, le discours était sensiblement le même.
La demande de réserve parlementaire, courant 2016 auprès de Mme la députée Karine Daniel (5000€, par dérogation étant donné que l'association ne se trouve pas sur sa circonscription) ne changera rien à la déroute du CID. Cette demande aurait été faite pour le remplacement du mobilier et du matériel informatique.
Cet hiver 2016-2017, une salariée est aussi en arrêt maladie. Les salaires ont été versés avec beaucoup de retard. La mairie aura tenté de remettre à flot le CID en versant la subvention 2017 en avance, en décembre 2016, en vain...
Alors voici peut être les réponses aux questions posées par Ouest France le 05 avril dernier :
« Mais comment une telle structure subventionnée par les collectivités, par l’État, a-t-elle pu dégringoler aussi rapidement ? Comment un conseil d’administration a pu découvrir l’étendue des dégâts alors qu’il était déjà presque trop tard ? »
Beaucoup de gens semblaient pourtant connaître cette situation aux vues des éléments ci-avant. On peut se poser la question : est ce qu'une cause quelle qu'elle soit justifie ce type de comportement ?
Est ce que cela justifie l'essorage mental et physique des salariés de l’associatif ?
La triste fin du CID tient tout autant de sa gestion financière que de sa gestion sociale en interne. Le CID, dans le climat actuel, devrait pouvoir continuer à vivre avec un autre casting et sous une autre forme étant actuellement en liquidation judiciaire. Peut-être opérera-t-il sa mue pour préserver ses 15 000 références et les mettre à dispositions des citoyens dans une gestion saine en interne et une vigilance accrue des financeurs, dans l'intérêt général.
Le CID est mort, Vive le CID ?
Louise V. Debs
Pour réaliser cet article j'ai entendu de nombreuses personnes, salariés, responsables et le service presse, n'ayant pas eu accès aux élus ou aux techniciens. Je ne remercie pas les insultes, ni les menaces proférées par certains personnages lors de la réalisation de cet article, quand il n'y a pas de fait, il n'y a pas d'enquête.
Informations supplémentaires sur le milieu associatifs :
Selon une étude de Recherche et Solidarités et de Viviane Tchernonog environ 37 000 associations se créent chaque année.
Le nombre de bénévoles s’accroît en même temps que le développement du secteur, c'est 16 millions de bénévoles qui s’engagent régulièrement ou ponctuellement pour une ou plusieurs associations (l'équivalent de 935 000 emplois à temps plein).
Il existe 18 000 000 emplois salariés en France et 1 045 000 d'emplois ETP dans le milieu associatif ce qui représente 5.8% du secteur privé.
Pourtant 87% des associations fonctionnent sans salariés. Ce secteur assez méconnu dans les détails est celui ou le salaire mensuel moyen est le plus bas (1 693 euros brut pour 2 833 dans l'industrie (source ACOSS-2013)). Le nombre de CDI est passé de 53% à 47% en six ans contre 87% dans le secteur privé lucratif. Enfin le nombre de CDI à l'embauche ne représente que 6% contre 16% dans le privé.
Le syndicat du travail associatif explique qu’il est difficile de se regrouper sur des métiers parfois très différents, tout autant que leurs conventions collectives respectives, en effet l'écart entre salariat et militantisme est dilué à la manière d'une aquarelle, comment l'aborder tout en respectant les droits des salariés,la préservation de leur santé et l’accomplissement d'un service public que l’État, lui, ne semble plus assumer ?
enquête / association / associatif / cid / nantes
Article réalisé par Rédaction Prun'
Publication : Jeudi 18 Mai 2017
Illustration : Anciens ateliers et Chantiers de Nantes qui abritaient le CID
Crédit photo : Wikimedia
THIELU - 31/05/2017 04h59